Fils du Soleil

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En septembre 2021 est paru chez Altaforte, à Rome, Figlio del Sole, una vita rivoluzionnaria da Che Guevara a CasaPound (Fils du Soleil, une vie révolutionnaire du Che Guevara à CasaPound). L’auteur, Sergio Pessot, nonagénaire, nous y conte soixante années de sa vie dans les rangs de diverses organisations fascistes, néo-fascistes et nationalistes-révolutionnaire d’Italie et d’Amérique latine.

Une jeunesse fasciste

Fils d’une famille immigrée en Argentine dès 1852, Sergio Pessot est cependant né … à Gênes en 1931 et ce alors qu’il n’a pas mis les pieds en Italie avant 1939 ! Cette curiosité de son état-civil s’explique par une particularité comportementale de la fraction la plus nationaliste des immigrants italiens d’alors : tout faire pour que leurs épouses enceintes accouchent sur le sol de la patrie. Comme les voyages transatlantiques étaient longs, chers et peu recommandés pour une future parturiente, les pères négociaient avec un capitaine de navire italien de passage dans un port argentin la possibilité que leurs femmes accouchent à son bord, le nouveau-né avait de ce fait vu le jour sur un lieu juridiquement rattaché au Royaume de Savoie et était donc inscrit au registre des naissances du port d’attache du vaisseau.

Sergio Pessot passe ses premières années dans la campagne argentine profonde où son père est un exploitant agricole prospère avant qu’une longue maladie entraîne son décès, la ruine de la famille et le retour de celle-ci en Italie en 1939. En 1944, à 13 ans, Sergio Pessot rejoint les Balilas de la République sociale, puis peu de temps après les Fiamme Bianche – organisation de combat des jeunes fascistes de la RSI âgés de moins de 18 ans – avec lesquelles il participe à des affrontements avec les partisans. En janvier 1945, il rejoint un groupe de francs-tireurs qui agissent sur les arrières des troupes alliées jusqu’à la défaite de l’Axe puis reste actif dans la région de Gènes au sein de l’organisation fasciste clandestine et combattante les Fasci d’azione rivoluzionaria. Quand la plupart de ses compagnons sont arrêtés et incarcérés, Sergio Pessot quitte l’Italie pour l’Argentine où il rejoint bientôt le Parti justicialiste et où il devient, en 1947, collaborateur du journal d’Evita Peron Junta Social. Celui-ci soutenant la campagne pour l’élection présidentielle en Bolivie de Paz Estenssoro qui veut nationaliser la production minière au main des yankee, Pessot se retrouve à La Paz où il s’occupe de la communication du candidat avec un autre jeune étudiant Argentin, qui est alors fasciné par le Manifeste de Vérone et la Charte du travail de la RSI et qui n’est autre que Ernesto Guevara, le futur Che. Alors que les sondages donnent Estenssoro élu, un coup d’État préventif met fin au processus démocratique et Pessot doit rentrer en Argentine où il ne cesse de grenouiller dans les milieux les plus radicaux, développant des amitiés au sein de la Phalange socialista boliviana, de l’Action integralista brasileira et des réfugiés Oustachis.

Les Fils du Soleil

Rentré en Italie en 1950, Pessot rejoint le MSI et participe activement aux actions militantes – parfois à la limite de la lutte armée – pour que la ville de Trieste reste italienne. Dans ce cadre, il rejoint au sein du parti la tendance I Figli del Sole fondée par Enzo Erra et qui s’exprime dans la revue Imperium. Alors que le MSI est partagé entre socialiste nationaux nostalgiques de la République sociale, réactionnaires crypto-monarchistes et anti-communistes occidentalistes, les Figli del Sole allient un radicalisme militant extrême à une référence à la Tradition et à l’œuvre de Julius Evola qui collabore un temps à leur organe de presse. Mais le courant d’Erra, bien qu’influent jusqu’au congrès du MSI de Viarregio de 1954, se divise rapidement entre les évoliens purs et durs, donc hostiles au catholicisme, regroupés derrières Pino Rauti qui s’en sépare au tout début de l’année 1955 pour fonder sa propre tendance Ordine Nuovo, et les traditionalistes crypto-catholiques, donc en contradiction partielle avec la pensée évolienne, menés par Erra. Le mouvement finit par s’essouffler et, en 1959, lassé par les vaines luttes d’appareil, Enzo Erra décide de quitter le MSI et de le concurrencer en plein jour en fondant le Movimento nazionale italiano. L’opération est un échec, elle entraine le retrait d’Erra de l’activité politique et est l’occasion pour la direction du MSI de mettre sur la touche les cadres de sa tendance qui ne l’avaient pas suivis.

Intermède et retour au front

Entre temps, Pessot a du faire son service militaire, à la fin de celui-ci l’échec visible du courant auquel il appartient le dissuade de revenir à la politique. Il va donc s’investir dans une vie professionnelle, d’abord dans la marine puis dans l’industrie où il occupe divers postes de cadre et de dirigeant.

Mais son éloignement de l’activisme n’est pas un renoncement et il profite de ses voyages professionnels pour tisser des liens avec ceux dont il se sent proche idéologiquement. Ainsi, en 1964, en Argentine, il se lie avec Dardo Manuel Cabo, un cadre du mouvement Tacuara qui sera à la fin des années 1970 le fondateur des Descaminados avant de tomber sous les coups des tueurs de la junte de Videla.

Au lendemain de son arrivée à direction du MSI, en 1987, Gianfranco Fini constate que Il secolo d’Italia, le quotidien du parti est en mauvaise santé : un lectorat en baisse et une rédaction de peu de qualité, il a alors l’idée de faire appel à d’anciens Figli del Sole pour le redynamiser. Un d’entre eux, Giano Accame en devient le directeur et Sergio Pessot est chargé de ses pages économiques. Le quotidien connaît une embellie qui se maintient durant la courte période où Rauti est à la tête du mouvement. Mais le retour de Fini à la direction du MSI et la nouvelle orientation qu’il souhaite lui donner met un terme à tout cela et l’équipe du Secolo d’Italia est licenciée.

Sergio Pessot est alors sexagénaire et plusieurs de ses amis de l’époque des Figli del Sole lui parlent de la création de CasaPound. Giano Accame lui confie : « J’ai trouvé chez CasaPound une vue du monde très proche de celle que nous avions » et Fabio De Felice lui dit : « Je vois que tu as encore le désir de lutter. Tu devrais te rapprocher de CasaPound ce sont les plus proches de ce que nous étions. »

Pessot rencontre quelques temps après Gianluca Iannone et, il l’écrit lui-même, « devient un militant de CasaPound, ayant retrouvé l’enthousiasme de ses jeunes années ».

Christian Bouchet

La diaspora des Fils du Soleil et la culture de droite

Nombreux sont les militants de la tendance et les anciens collaborateurs d’Imperium à avoir, par la suite, sur une durée d’environ dix années, initié des revues qui eurent une grande importance dans la naissance d’une culture de droite sur les marges du MSI.

En 1955, Pino Rauti lance le journal Ordine nuovo qui allie évolisme et un socialisme national qu’Evola critique pourtant.

En 1956, Massimo Anderson fonde la revue Azione.

En 1960, Giano Accame, associé avec Gianni Baget Bozzo, crée le bimensuel Lo Stato.

En 1963, Silvio Vitale et Gabriele Fergola fondent la revue contre-révolutionnaire, donc hostile au Risorgimento et au nationalisme italien, L’Alfiere.

La même année, Gennaro et Angelo Ruggiero publient le premier numéro de Tradizione.

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