Un Nuremberg II pour l’armée juive ?

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Entretien exclusif avec Saint-Loup paru dans Pour une Jeune Europe, périodique de combat socialiste européen, n°7, été 1970.

Saint-Loup vous revenez du Proche-Orient, que pensez-vous du conflit israélo-arabe ?

Je pense que les arabes possèdent 100 ans de retard sur l’évolution culturelle et technique du monde. Ils ne manquent pas de courage, mais le sens de l’organisation leur échappe. Ils sont divisés  entre eux par le jeu des intérêts des grandes puissances.

Les revenus du pétrole qui pourraient leur permettre d’accomplir de grandes choses représentent une malédiction. Je dissocie la cause des Palestiniens de l’ensemble. Elle est fondamentalement juste. Voilà des gens qui vivaient depuis 6 000 ans et sans doute plus sur les terres bibliques sans rien demander à personne. A la fin du XIXe siècle, les juifs de la diaspora ont commencé une colonisation pacifique de la Judée. Après la Seconde Guerre mondiale, cette colonisation s’est étendue par la force. Elle subjugue maintenant tout le pays jusqu’au Jourdain. On ne saurait nier aux Palestiniens le droit à la révolte ni l’usage du terrorisme qui est l’arme des faibles et des opprimés.

Mais les juifs n’ont-ils pas mille bonnes raisons, eux aussi, de s’implanter sur des terres qu’ils dominèrent au temps du roi David ? Ils ne peuvent vivre éternellement dans la diaspora et ils ont droit de jouir d’une indépendance nationale comme les autres peuples.

Votre question ne manque pas d’intérêt. J’ai commencé une série d’ouvrages sur la renaissance, dans le monde, du sentiment des patries charnelles. Le premier livre paru dans cette série, c’est Nouveaux Cathares pour Monségur.

Vous préparez donc un livre sur Israël ?

Oui, Le Sang d’Israël paraîtra, je pense, à la fin de l’année aux Presses de la Cité.

L’éclairage que vous projetez sur ce sujet est-il positif ou négatif ?

Les deux. Le problème posé par Israël est complexe. Si l’on admet qu’un peuple, étable sur une terre (pour une courte période, d’ailleurs, dans le cas israélien), est justifié à y revenir deux mille ans plus tard sur la simple autorisation de vagues promesses faîtes dans des livres saints dont l’historicité n’est nullement fondée, alors la politique israélienne d’aujourd’hui est parfaite !

Mais si on refuse aux livres sacrés juifs toute valeur en droit international moderne, la conquête de la Palestine est une pure entreprise de piraterie et tout ce que les juifs y font tombe sous le coup des lois de Nuremberg.

Vous êtes dur !

Je réponds à des questions. Je ne suis pas juriste. Mais comme historien, je sais hélas que les nations n’ont acquis de place au soleil qu’à coups d’épées et Israël ne déroge pas à la tradition. Pour une fois que le général de Gaulle ne s’est pas trompé quand il a rappelé que la nation française s’était créée au fil de l’épée.

Quelle impression rapportez-vous de Jérusalem ?

Cette ville qui tient tant de place dans l’histoire ancienne et moderne est touristiquement affligeante.

Et les lieux saints ? Le tombeau du Christ ?

Écoutez, si j’étais catholique, je me serais aussitôt fait cathare après avoir vu tout ça ! Et en particulier en repensant au plateau posé sur le tombeau du Christ et dans lequel s’accumulent livres palestiniennes, dollars, deutschmarks et francs français. Ce pauvre homme n’avait vraiment pas mérité cela.

Et le mur des lamentations ?

Également affligeant. J’y ai vu des rabbins conduisant des groupes de jeunes et poussant des vociférations impressionnantes, brandissant le poing levé vers le ciel. Je me suis toujours demandé quelle était la raison de leur colère apparente. Ils avaient récupéré leurs lieux saints, gagné la guerre des six jours avec aisance, fait retour dans la patrie des ancêtres. Que demandaient-ils en supplément ?

Voilà ce qui est inquiétant dans l’aventure israélienne n’est-ce pas ?

C’est exact. On ne sait pas du tout jusqu’où ils veulent aller. J’ai rencontré des partisans du Grand Israël, du Nil à l’Euphrate, mais est-ce que cela leur suffira ?

D’aucuns disent qu’ils veulent dominer l’univers entier. C’est un gros morceau, mais on ne sait jamais !

Que pensez-vous du comportement des Israéliens ?

Si l’on élimine le point de droit international posé par leurs conquêtes et que l’on juge en fonction de l’expérience historique, il est assez remarquable. Tsahal, c’est la Waffen SS. L’administration, la police, sont admirablement dirigées. Je ne voudrais pas être fedayin à Jérusalem !

C’est donc un État fasciste ?

Avec « une main de fer dans un gant de velours », c’est en effet un État fasciste. Avec une enveloppe démocratique. La dialectique parlementaire couvre très bien la dictature de l’état-major et des services secrets.

C’est donc un État qui doit vous plaire ?

Il plait à la droite, et c’est pour cela que la popularité d’Israël est considérable dans les milieux de droite et nulle dans les milieux de gauche. Moi, je n’appartiens ni à la droite, ni à la gauche.

Mais c’est un État raciste, et vous êtes vous-même raciste…

Nullement, je suis racialiste.

C’est-à-dire ?

Le racialisme reconnaît la différenciation raciale qui sépare les différents groupes humains. Il admet que les races sont douées de possibilités différentes mais ne s’autorise pas de l’existence de races plus douées que d’autres pour conseiller l’impérialisme et l’oppression. Bien au contraire ! Il attend de chaque race qu’elle s’épanouisse dans le champ de son propre génie, ce qui constitue un facteur culturel important pour le monde entier. Dans le cas d’Israël, malheureusement, quelques-uns de ses dirigeants ont un comportement raciste, non seulement à l’égard des Palestiniens occupés mais encore vis-à-vis d’une partie de la population juive. Les ashkenaze, minorité issue de l’Europe et qui porte l’État d’Israël à bout de bras, considèrent les séfarades comme de vulgaires cireurs de bottes.

Ne craignez-vous pas de voir les Arabes passer dans le camp marxiste ?

C’est impossible idéologiquement tant que l’islam conserve ses références religieuses. J’ai vécu avec des gens du Fatah. Quand je leur demandais pourquoi leurs armes étaient d’origine russe, ils me répondaient : « Si les Américains nous armaient comme ils le font pour Israël, nous ne nous adresserions pas à Moscou ! »

Dans quel sens évoluera la situation au Proche-Orient ?

Ce n’est pas Saïgon, mais Jérusalem qui constitue le détonateur de la troisième guerre mondiale. Les États-Unis n’abandonneront jamais Israël et la Russie renoncera difficilement aux positions récemment acquises. Une surenchère entre ces grandes puissances conduit à la guerre. Du premier conflit mondial est sorti le Foyer national juif. Du second, l’État souverain d’Israël. Les impérialistes juifs espèrent bien que d’une troisième guerre mondiale sortira le Grand Israël appelé peut-être à régir les destinations du monde.

Que pensez-vous de la politique française au Proche-Orient ?

De Gaulle a pris ses distances avec l’État d’Israël et c’est excellent. Nous n’avons pas les moyens d’arbitrer les conflits de la dimension de ceux qui mûrissent dans le Proche-Orient. Nous devons nous garder de tous les impérialismes et songer à faire l’Europe.

Comment concevez-vous cette Europe ?

Je suis contre l’Europe des technocrates et des profiteurs du « marché commun », pour la libération des ethnies qui la composent et qui lui ont donné son génie. Demain, elles peuvent lui restituer sa haute culture et sa force légendaire. Les nations historiques qui la déchirent et la neutralisent ont fait leur temps. Nous ne voulons plus connaître de patries autres que charnelles.

Vous n’êtes donc pas nationaliste ?

Je le serai si les nationalistes voulaient bien me définir ce qu’est un Français. Pour moi, et je le dis sans aucune hostilité, un Martiniquais, un Bambara, un Soudanais, un Berbère de l’Atlas n’est pas un Français. L’Europe des ethnies, en se confédérant, doit éliminer systématiquement ces allogènes de son corps social et leur rendre leur dignité propre de Martiniquais, de Bambara, de Soudanais, de Berbère. Je suis pour la liberté des Basques, des Bretons, des Alsaciens, au même titre que celle des noirs et des jaunes.

 

 

 

 

 

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