Au sujet du report du sommet Poutine-Trump

Alexandre Douguine

Faisant entièrement confiance à Poutine et ne doutant pas un instant de son dévouement absolu aux intérêts de la Russie, je ne peux m’empêcher de ressentir une inquiétude à chaque mention de négociations avec l’Occident. Même avec Trump.

L’élite russe reste en partie dépendante de l’Occident. Certains ont encore des comptes là-bas, d’autres des proches, d’autres des biens immobiliers coûteux, certains bénéficient de programmes de subventions, d’autres ont une mentalité occidentale. Peu nombreux sont ceux qui ont dit adieu à l’Occident pour de bon et se sont sérieusement engagés du côté de la vision souveraine de la Russie en tant qu’État-civilisation. Quiconque a acquis quelque chose auparavant l’a placé d’une manière ou d’une autre en Occident.

C’est pourquoi chaque fois que la perspective de négociations apparaît, toute cette couche de l’élite (et cela concerne presque tout le monde!) retient son souffle avec délice: et si ça marchait cette fois… Cette créature à mille têtes des sept boyards commence à souffler dans le dos de Poutine. Allez…

Et donc, quand l’Occident, voyant la fermeté de notre position et que Poutine ne compte pas céder aux ruses ni compromettre les intérêts de la puissance, se retire des négociations et revient à la vieille pratique de la pression directe, je ressens un soulagement.

La dépendance à l’Occident est une addiction pathologique, comme le sel ou la drogue. On comprend intellectuellement qu’il ne faut pas, mais une force biologique intérieure, brisant toute rationalité, réclame une dose. L’Occident est une perversion et une tentation, et peu de gens peuvent y résister.
Et le fait que pendant des décennies on ait volé en Russie et caché à l’Occident ajoute un aspect rationnel à cela. Là où est votre trésor, là est votre cœur. La dépendance trouve sa base. Et le thème de Budapest ou un autre symbole devient un objet de convoitise.

C’est pourquoi le report du sommet Poutine-Trump, du point de vue de la thérapie sociale, est positif, et même magique.

Nous devons nous concentrer sur le déploiement de l’architecture sociale russe — pleinement souveraine — et les fantasmes pathologiques de l’élite sur une paix rapide gênent sérieusement notre concentration à ce sujet.
Nous avons besoin de la Victoire. Et rien d’autre. Sans elle, la Russie n’existera pas.

Et l’élite russe doit être meilleure, «nôtre», «russe». Sans dépendances ni pathologies.

Alexandre Douguine, 23 octobre 2025

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