Sahra Wagenknecht a reconnu qu’elle était en train de créer un parti. Est-ce l’occasion d’unir la droite et la gauche? C’est là qu’intervient le nouveau livre de l’auteur à succès Manfred Kleine-Hartlage, Querfront. Die letzte Chance der deutschen Demokratie (= « Front transversal. La dernière chance de la démocratie allemande »), tombe à point nommé. En savoir plus: cf. infra.
Le journal Die Welt écrivait récemment : « Les signes se multiplient selon lesquels la politicienne de gauche Wagenknecht prévoit de fonder un parti. En coulisses, les détails de cette fondation sont explorés depuis longtemps ».
« Ce serait raisonnable »
En premier lieu, le journal du groupe Springer se réfère à une conversation entre Wagenknecht et le rédacteur en chef de la Freie Presse à Chemnitz fin avril. Elle y déclare : « Il y a énormément de gens – je le remarque aux échos que je capte, aux mails que je reçois ; les sondages le disent aussi – qui ne se sentent plus représentés par aucun parti ».
Selon le journal, il est problématique qu’une partie importante de la population ne soit plus réellement représentée. Wagenknecht clarifie ensuite sa position : « Il serait donc raisonnable qu’une force nouvelle voit le jour ».
Selon les informations de Die Welt, il n’y a pas encore de décision définitive – « même si la tendance semble aller vers la création d’un parti ». Si l’on en croit le journal, il s’agit pour l’instant avant tout de questions juridiques, organisationnelles, financières et personnelles, ainsi que des chances de succès.
« Si la gauche se restructurait complètement, avec des têtes attrayantes à la tête du parti et un programme raisonnable, j’arrêterais immédiatement toute réflexion sur une nouvelle fondation », déclare Wagenknecht, avant d’ajouter: « Mais je ne vois pas cela. L’adhésion à Die Linke a beaucoup changé ces dernières années ». Le principal problème, selon elle, est qu’une certaine gauche veut être plus verte que les Verts et s’occupe de « sujets comme les styles de vie woke », pour lesquels il n’y a pas de base électorale suffisante.
Guérot est de la partie
La politologue Ulrike Guérot, qui a récemment risqué sa peau pour avoir critiqué le gouvernement sur les thèmes de la guerre en Ukraine et du coronavirus, fait pression : « Si Sahra Wagenknecht créait un parti, j’en ferais partie ».
Guérot poursuit : « A mon avis, il faut une force politique, un parti de la raison, qui ne mette pas l’idéologie ou la morale au centre, mais, au contraire, n’avance que des arguments factuels ». Elle ajoute : « Un parti pour un centre bourgeois qui n’est pas satisfait de cette politique marquée par la morale. Un parti pour la liberté, la paix, la raison ».
En outre, il faut enfin en finir avec « l’exclusion morale ». Il existe en effet une tendance à éviter de prendre certaines positions par peur d’être « applaudi du mauvais côté ». Dans le cas contraire, on est vite considéré comme « de droite ». Cette stigmatisation a créé « un vide politique » qui doit être comblé, « et pour lequel je vois un grand potentiel électoral ».
La question délicate
Même Die Welt remarque cependant ici: « Mais c’est précisément ce point qui soulève une question délicate : Où s’arrête la propre tolérance de Wagenknecht ? Qui, même elle, ne veut-elle pas avoir dans son parti » ?
Dans son livre « Querfront », Manfred Kleine-Hartlage écrit : « Il n’y a plus qu’une seule et minuscule chance d’empêcher le naufrage final de la démocratie en Allemagne, et c’est la coopération entre l’opposition de gauche et l’opposition de droite: non pas parce que les forces d’opposition seraient idéologiquement d’accord entre elles, mais parce qu’elles ne le sont justement pas ».
Et plus loin : « Elles devraient cependant être d’accord sur le souhait de vivre à nouveau dans un pays où les conflits politiques sont réglés par des arguments, et non par diverses variantes d’exclusion et d’intimidation allant jusqu’à la terreur ; dans un pays qui ne se laisse pas abuser comme n’étant que le pauvre larbin d’une grande puissance impérialiste et qui peut donc en toute liberté contribuer à la paix en Europe; dans un pays où les principes de l’État de droit sont à nouveau en vigueur; dans un pays qui est capable, entre autres pour cette raison, de s’attaquer à ses problèmes et de se construire un avenir ! »
Dans ce contexte, Die Welt rappelle également le numéro de décembre de COMPACT avec Wagenknecht en première page ou l’invitation de Björn Höcke, président de l’AfD en Thuringe, à ce que Wagenknecht rejoigne l’AfD.
En ce qui concerne les chances de succès de Wagenknecht, Die Welt : « L’année prochaine, il y aura des élections européennes. Le principe des listes nationales n’existe pas plus qu’une clause d’exclusion. Même si un parti forgé par Wagenknecht devait donc manquer de base d’ici la fin de l’année, les élections européennes pourraient devenir une rampe de lancement ».
Sans des forces dites de droite, Wagenknecht ne peut toutefois pas gagner. C’est ce qui ressort également du livre Querfront ! La dernière chance de la démocratie allemande ». Sur 224 pages, Manfred Kleine-Hartlage parle à la conscience des gauchistes endurcis, mais aussi à celle de la droite, trop étatiste dans de nombreux domaines.
Sven Eggers