Débat encore courtois avec Daniel Conversano et Alexandre Cormier-Denis sur cette question cruciale.
Nous avons vu, il y a quinze jours, que les nationalistes français et les nationalistes de l’Europe orientale n’ont pas du tout les mêmes intérêts. Les nationalistes ukrainiens ou polonais, par exemple, qui habitent dans des pays encore ethniquement homogènes et qui vivent en partie des subventions de l’Union européenne, ont tout intérêt au statu quo – à ce que rien ne bouge. Nous, nous avons au contraire tout intérêt à déstabiliser les régimes soi-disant démocratiques qui sont en train de transformer nos pays en dépotoirs du tiers-monde. Voilà ce que je disais.
Je constatais aussi que les patriotes pro-Zélensky (pro-Ukraine), très minoritaires dans la droite nationale française, sont souvent mariés avec des femmes de l’Europe orientale ou ont eu une petite copine en Pologne ou en Ukraine. Quand ils habitent sur place, ils bénéficient souvent des allocations de l’État français, qui leur permettent de vivre à peu près décemment dans ces pays où tout est encore moins cher qu’ici. En somme, Ils raisonnent en fonction de leurs intérêts personnels, et certainement pas en fonction d’intérêts supérieurs.
Ce qu’ils souhaiteraient, c’est que les armées de l’OTAN et des mercenaires occidentaux aillent dérouiller les Russes pour que l’Ukraine et l’Europe orientale puissent conserver leur indépendance et leur niveau de vie, qui a considérablement augmenté ces deux dernières décennies avec les milliards d’euros tirés de la poche des contribuables français et allemands.
Ce qu’ils souhaiteraient, c’est que le patriote français aille dare-dare se faire trouer la gueule pour que tout ce petit monde puisse continuer à profiter de la société de consommation le samedi et saluer le bras tendu son équipe de foot préférée le dimanche. Parce que, de fait, les partisans de Zélensky dans le milieu patriote français sont surtout des supporters d’équipes de football. Je ne porte pas de jugement ; je constate.
Je constate aussi qu’aucun penseur d’envergure de la droite nationale ne s’est aventuré à soutenir le régime de Zélensky en compagnie de Bernard-Henri Lévy, Raphaël Glucksmann et Emmanuel Macron dans leur croisade anti-Poutine. Et c’est heureux. Seuls trois youtubeurs ont exprimé leur attachement à l’Ukraine ; et ce, pour la raison bien simple que ce pays connaît depuis une trentaine d’années une floraison de mouvements nationalistes dont la plupart sont fortement teintés de sympathie pour le Troisième Reich allemand. Là encore, je ne porte pas de jugement : je constate.
Le paradoxe est qu’aucun de ces youtubeurs (Alexandre Cormier-Denis, Daniel Conversano et Julien Rochedy) ne se réclament de cette idéologie, et encore moins de son antisémitisme. Mais visiblement, ce ne sont pas les paradoxes qui dérangent ces patriotes d’un nouveau genre.
Suite à la tentative de coup d’État qui s’est déroulée en Russie le samedi 24 juin, Alexandre Cormier-Denis, patriote Québécois, n’a pu contenir une satisfaction pleine d’espérances à l’idée de voir Poutine enfin destitué. Il a vite été déçu.
Voyez ce qu’il a publié sur Twitter : « J’invite la droite nationale encore majoritairement pro-russe à revoir son positionnement géopolitique au plus tôt pour ne pas se retrouver dans un cul-de-sac idéologique. La haine de l’Occident et le néo-tiers-mondisme sont des voies de garage. »
Le cul-de-sac idéologique, selon Cormier-Denis, c’est de préférer une Russie qui a renoué avec ses traditions chrétiennes orthodoxes à un Occident dont les valeurs premières sont le métissage, la laïcité et le transsexualisme.
Si Cormier-Denis combat les valeurs LGBTQPed, comme il l’affirme, il devrait donc normalement combattre les régimes de l’Union européenne qui en font une promotion effrénée. Ce serait logique. Mais non. Écoutez cela : « Bien que nous soyons insatisfaits de la direction que prennent nos pays – marxisme culturel, immigration de remplacement, transgenrisme, etc. – il faut travailler à la restauration de l’Occident qui demeure notre grande maison commune et non pas souhaiter la victoire de ses ennemis, ce qui ne ferait qu’empirer dramatiquement notre situation et compromettre durablement l’avenir de nos enfants. »
C’est là que j’ai réagi, dans les commentaires : Notre « grande maison commune » ? Avec Soros, Attali, Macron et BHL ? Quelle blague ! En 1940, c’est évident, vous auriez rejoint le général de Gaulle. Et chez nous, les nationalistes français, vous auriez bien évidemment été considéré comme un traître. » Et j’aurais pu ajouter : « … et l’on vous aurait fusillé, purement et simplement. »
Vous voyez maintenant pourquoi cette question ukrainienne est cruciale, absolument cruciale ? Parce qu’avec des idées et des convictions extrêmement proches, nous pouvons être amenés très rapidement à nous éliminer les uns les autres si la situation l’exige. Exactement comme en 1940, où une partie des patriotes (les moins conscients, les moins cultivés, les moins visionnaires) étaient partis rejoindre le général de Gaulle, tandis que vrais nationalistes, qui savaient à quoi allait être livrée l’Europe en cas de victoire des bolcheviks et des Anglo-Saxons (c’est-à-dire en cas de victoire du cosmopolitisme international), avaient choisi la grande Europe. Quatre-vingts années plus tard, on voit le résultat.
Alexandre Cormier-Denis s’explique : « Il faut viser la restauration de nos pays et non leur destruction ou leur inféodation aux civilisations revanchardes qui jalousent notre domination mondiale depuis plusieurs siècles. Même quand l’Occident va mal, il demeure la plus grande civilisation qui soit, bâtie sur le triple socle commun de la philosophie grecque, du droit romain et de la spiritualité chrétienne. »
Sauf que je l’on n’entend pas beaucoup de philosophie grecque quand on allume la radio, qu’on ne ressent pas beaucoup de spiritualité chrétienne quand on allume la télé, et que devant un tribunal, le patriote français est systématiquement condamné. Quand il ne restera plus que 10 % de Blancs en Occident, Alexandre Cormier-Denis nous priera-t-il encore de défendre cette « civilisation » ? On ne va pas s’étendre là-dessus : ceux qui ont lu nos livres savent de quoi on parle. Et j’ai déjà expliqué dans l’article précédent que souhaiter un changement de régime en s’appuyant sur une puissance étrangère n’est pas une nouveauté dans l’histoire européenne.
Daniel Conversano intervient alors sur son fil Twitter pour défendre Cormier-Denis. Selon lui, l’Allemagne nazie en 1940 comme la Russie aujourd’hui n’agissent qu’en fonction de leurs intérêts propres, et pas en fonction des intérêts de la race blanche ou de la civilisation européenne : « Ce que j’en pense : Hitler n’a pas mené une guerre contre le gauchisme – inexistant, à l’époque – mais une guerre d’expansion. »
– C’est bien mal connaître le phénomène national-socialiste. En vérité, l’hystéro-gauchisme était aussi virulent dans l’Allemagne des années 20 que dans la France d’aujourd’hui. Les livres brûlés par les SA étaient pour la plupart ceux de la mouvance freudo-marxiste, qu’on appelle aujourd’hui LGBTQPed. Et quand on lit Mein Kampf ou les autres publications de l’Allemagne nazie, on perçoit parfaitement une vision eschatologique qui dépasse très largement les objectifs des chefs militaires et des supporters de football.
« Hitler considérait les Slaves comme inférieurs », poursuit Conversano. Il s’est associé avec les Japonais contre l’Europe de l’ouest et les USA (trahison civilisationnelle). »
– La « trahison civilisationnelle » est un concept foireux.
Aux Amériques, par exemple, les Anglais s’étaient alliés avec les Cherokees : trahison civilisationnelle. Les Français s’étaient alliés avec les Sioux : trahison civilisationnelle. En 1914, les Allemands se sont alliés aux Ottomans : trahison civilisationnelle. En 1895, les Anglais arment les Ethiopiens contre les Italiens : trahison civilisationnelle. Les Américains avaient des Noirs dans leur armée en 1944 : trahison civilisationnelle. Pour faire échec aux ambitions de Charles-Quint, François Ier s’était allié au Grand Turc : trahison civilisationnelle. Les Russes acceptent que des tchétchènes se battent à leurs côtés : trahison civilisationnelle. Les Ukrainiens acceptent des jihadistes dans leurs rangs pour cartonner des Russes : trahison civilisationnelle.
En réalité, il n’y pas de » trahison civilisationnelle ». Dès lors que l’ennemi principal est défini, un État noue des alliances pour tenter d’anéantir la menace. Cela s’appelle la diplomatie ; tout simplement.Daniel Conversano note que les Français avaient aussi enrôlé des Africains pendant la première Guerre mondiale, et il ajoute, pour défendre la république ( !) : « … mais la situation en terme d’immigration en métropole n’était pas du tout la même qu’aujourd’hui. »
En bien non : les nationalistes français avaient déjà parfaitement conscience dans l’entre-deux guerres de la dégénérescence raciale imposé par le régime républicain : Drieu La Rochelle, Brasillach, Céline, Pierre-Antoine Cousteau, Lucien Rebatet et beaucoup d’autres se sont élevés contre cette envahissement des étrangers encouragé par le régime. Il s’agissait à l’époque des juifs, des Italiens, des Arméniens, des Noirs, des Algériens et des Annamites. C’était le début de la grande invasion que nous connaissons. Les intellectuels français avaient fait leur travail en nous mettant en garde contre ce qui se préparait ; exactement, d’ailleurs, comme nous-mêmes mettons en garde les Polonais contre ce qu’ils vont subir dans les décennies qui viennent s’ils s’obstinent à rester dans l’Union européenne.
« Les Etats-Unis étaient une nation au suprémacisme blanc assumé », dis-tu.
– Rien du tout ! Que dalle ! Zéro ! En tout cas, pas officiellement. Si le racisme était naturel chez une bonne partie des Américains, là-bas, comme en France, le régime démocratique travaillait déjà sans relâche à faire comprendre à la population que les mœurs devaient changer. J’ai déjà beaucoup parlé de tout cela, et je n’y reviendrai pas. Et je te rappelle que si les Américains ont déversé 900 000 tonnes de bombes sur l’Allemagne nazie, ce n’était pas pour défendre la race blanche.
« Aucun de nous ne sait vraiment pour qui il se serait battu dans ce contexte, et je doute qu’Hervé aurait vu d’un bon œil des Allemands débarquer dans sa ville et y imposer leur domination. »
– Et moi, Daniel, je t’affirme que les nationalistes français de 1940 savaient parfaitement à quoi s’en tenir sur la nature du régime, les projets des démocraties occidentales et leur alliance naturelle avec le bolchevisme international. C’est donc avec la plus grande certitude que je te dis que je n’aurais jamais rejoint le général de Gaulle.
« Il faut vraiment arrêter de penser le monde en se référant à la seconde guerre mondiale. A posteriori, on se dit « Ah, si Hitler avait gagné, patati patata » mais ce sont des pensées anachroniques. »
– Si tu avais un peu plus de culture, si tu avais lu davantage, tu comprendrais que les forces en présence aujourd’hui sont exactement les mêmes qu’en 1940. Les projets sont les mêmes. C’est une guerre à mort qui ne peut se solder que par l’anéantissement d’un des deux camps. Et il ne faut pas se tromper de camp.
Je ne relève pas les accusations de marxisme, dont tu m’accables ; elles sont ridicules. Cormier-Denis en rajoute sur mon fil de commentaires Telegram ce 26 juin en m’attribuant des idées que je n’ai pas : « Il s’agit en fait d’une sorte de gauchisme nihiliste qui se perpétue sous les oripeaux d’une radicalité révolutionnaire visant à détruire l’Occident capitaliste. »
– Je lui ai répondu que si j’ai été Gilet jaune, c’était entre autres choses par conviction libérale, par défense de la libre entreprise écrasée en France par toute sorte de taxes. J’aime les gens qui se démerdent eux-mêmes, sans l’aide de l’État, et j’aime les gens qui réussissent socialement et financièrement. Je n’ai rien d’un gauchiste.
Cormier-Denis ajoute : « Personnellement, je n’ai aucune envie de vivre dans le système de type national-communiste chinois, mais je comprends que les rouge-bruns y voient logiquement un modèle à suivre ». « Entre Washington et Pékin, je choisirai toujours Washington. »
– En somme, toi et Cormier semblez raisonner par rapport au confort que vous apporte le système politique en place. Vous avez l’air de n’avoir aucune vision de l’avenir de l’humanité et de ce qui se prépare dans la tête des oligarques mondialistes.
Et je ne suis pas non plus « anti-américain », comme tu as l’air de le penser. De très nombreux nationalistes américains pensent très exactement comme nous sur tous les sujets. Je ne confonds pas ces patriotes américains avec le gouvernement cosmopolite qui dirige leur pays et qui est de la même nature que le nôtre.
Tu dis, pour finir, qu’ « il faut accepter la supériorité militaire de l’OTAN sur la Russie ».
« La France est un pays occidental et son alliance naturelle est l’Alliance atlantique », te réponds Cormier-Denis. Avec la carte de la grande Union européenne de 600 millions d’habitants métissés (jusqu’à Kiev) postée par Julien Rochedy, je comprends maintenant que nous ne sommes plus dans le même camp, et qu’en cas de guerre, nous serons amenés fatalement à nous tirer dessus.
Tu incites les patriotes français à aller vivre en Pologne et en Roumanie et donc implicitement à s’engager dans les milices d’Azov pour combattre les soldats russes. Soucieux de préserver le sang des jeunes Européens – surtout dans une guerre qui ne sert que les intérêts de nos ennemis – je crois qu’il serait préférable que tous ces braves de Pologne et d’Ukraine arrivent massivement en France pour venir nous aider à combattre la pieuvre mondialiste sur notre territoire.
Je suis pour ma part convaincu que nous sommes en 1937, et qu’une nouvelle conflagration mondiale va éclater, parce que les oligarques qui dirigent l’Occident – dont tu te prévaux – sont des fanatiques que seules les balles peuvent arrêter. Je l’ai déjà dit : ils sont comme ces machines de fer qui ne s’arrêtent que lorsqu’on les brise. Tous ces salopards qui fomentent des guerres un peu partout dans le monde depuis des lustres doivent être arrêtés, d’une manière ou d’une autre.
Et ne me dis pas que la Russie n’a pas de légitimité dans cette affaire. Quel État accepterait d’avoir des têtes nucléaires à sa frontière pointées contre sa capitale ? Les États-Unis ont réagi avec vigueur en 1961, quand les soviétiques ont tenté d’en installer à Cuba. Les Russes, aujourd’hui, n’accepteront jamais d’avoir des militaires de l’OTAN à 400 kilomètres de Moscou. Je pense que vous êtes capables de comprendre cela. L’Ukraine doit être un État neutre ou bien revenir à ce qu’elle était depuis des siècles. Mais à la vérité, je pense qu’il est déjà trop tard. On y va… et je déplore que par lâcheté, par bêtise ou par ignorance, il y ait une fois de plus des patriotes qui se trompent de camp : comme en 14, comme en 40. Les sympathisants qui vous suivent en arriveront logiquement à se faire buter pour sauver la démocratie. Désolé, mais on ne peut pas vous laisser faire.
Hervé Ryssen.