Le thème de l’écologie commence à pénétrer l’espace public en France à partir des années 1970. René Dumont, marxiste et auteur de l’Utopie ou la mort avait été le premier candidat écologiste à la présidentielle (en 1972, où il obtient 1.32 % des voix).
Ecolos, les NR ? Oui, pour les plus sérieux d’entre eux. Je me suis demandé si nos Anciens s’étaient intéressés à la question, et après quelques recherches je me suis rendu compte que le sujet n’intéressait que très inégalement. Thiriart n’y consacre pas un mot. Pour Duprat en revanche, c’est différent.
Retenons d’abord la formule employée par Duprat : « L’écologie n’est qu’une projection de l’idéologie nationaliste-révolutionnaire. »
Dans le numéro 8 de Les Cahiers européens mensuels d’avril 1977, François Duprat consacre un article au sujet de l’écologie. Il y a là de quoi méditer.
Duprat s’y moque des libéraux et des marxistes à la recherche d’une « nouvelle vertu écologiste » et qui « font assaut de volonté écologiste » alors même que leurs idéologies, intrinsèquement productivistes, « apparaissent liées sur le plan de la poursuite de la destruction du cadre naturel » étant donné leur « productivisme acharné ». Il ironise sur les nouvelles considérations ambiantes dans le monde politique hexagonal, selon lesquelles : « les adeptes de la vie naturelle, hier fascistes, sont baptisées progressistes et la vague verte est priée de refluer gentiment vers la gauche unie. » Il précise : « cette escroquerie n’est possible qu’en raison de l’absence totale des nationalistes sur ce terrain de combat, pour la France au moins. »
L’analyse de Duprat sur ce sujet est claire : « (…) la société moderne gaspille toutes les ressources naturelles de notre planète, dans le seul but de développer encore une société de consommation, forme d’esclavage sophistiquée de l’humanité. »
Mais le message principal de son article est d’abord et avant tout de s’adresser aux nationalistes : « nous sommes les seuls à ne pas vouloir de la société productionniste, la marxiste ou la capitaliste. »
L’historien NR des années 1970 tente de sensibiliser son camp, au sens le plus large, à ce sujet : « nous devons simplement mettre en avant les mots d’ordre qui sont authentiquement nôtres ». Le conseil qu’il donne est simple : « Les nationalistes doivent participer au combat écologique parce que le monde moderne, façonné par le marxisme et par le capitalisme, leur fait horreur. »
Et il affirme : « Nous avons à lutter contre ceux qui ont transformé de vastes parties de notre planète en un dépotoir, pour augmenter qui la puissance d’une bureaucratie tyrannique, qui le taux de profit de certaines puissantes sociétés. Le nationalisme, au contraire, s’insère dans une vaste perspective historique, qui est celle de la transmission par les générations éphémères du trésor de la Tradition. Nous ne voulons pas laisser un monde saccagé à nos descendants, et le saccage matériel est uni au saccage moral, tous deux provoqués par la société hyper-capitaliste que nous subissons. »
Il explique le lien fondamental entre écologie et nationalisme-révolutionnaire : « (…) nous sommes les seuls à ne pas sacrifier l’avenir au présent ; pour nous, l’avenir est déjà là, tandis que le passé cohabite encore avec le présent. Nous ne voulons pas séparer ces notions qui, pour notre idéologie, sont parfaitement complémentaires. » et « cette conception du monde est celle des nationalistes, celle de ceux qui ne cessent de lutter contre les idéologies sœurs qui se partagent le monde et qui le pillent et le détruisent, le libéralo-capitalisme et le marxisme. »
Duprat donne ainsi un cap : « « En luttant contre le régime, nous pouvons ainsi lutter contre toutes les idéologies qui s’efforcent de détruire notre conception même de l’homme et de sa place dans la nature. »
Même si le terme de « décroissance » n’apparaît jamais sous la plume de Duprat, les propos qu’il tient y font naturellement penser. Ce sera à Alain de Benoist de développer cet aspect de la doctrine d’un point de vue nationaliste, et ce notamment dans son ouvrage « La décroissance ».
Des NR allemands de la N.A.R.O.-S.d.V. tentent d’infiltrer les Grünen, l’équivalent des Verts en France. Mais une purge interne mettra fin à l’expérience, en 1980-1981.
On se souvient aussi que les NR français de Nouvelle Résistance, dans les années 1990, se passionnaient pour l’écologie. Ils avaient tenté d’infiltrer les Verts, ancêtre de l’actuel Europe écologie les Verts. C’était plus particulièrement le courant d’Antoine Waechter qui intéresse les NR de l’époque, notamment parce qu’à l’époque, et même encore aujourd’hui, l’ancien candidat écologiste à la présidentielle se réclamait d’un positionnement « ni droite, ni gauche », tout en étant favorable à une Europe des régions. Suivant ce qu’Alain de Benoist suggérait dès 1989, les NR tentent d’infiltrer la branche jeunesse des Verts, Ecolo-J. On est alors en 1992. Le but est de pouvoir s’installer sur des listes électorales en position éligible, et en cas d’échec de s’assurer d’une publicité satisfaisante pour l’évènement. Les NR d’Europe se coordonnent, des tentatives sont faites dans le même temps en France, en Espagne, en Allemagne, en Italie, en Pologne et au Royaume-Uni. C’est en fait tout le Front européen de Libération de cette époque qui se mobilise en ce sens.
Moins d’un an plus tard, Ecolo-J exclut 16 de ses membres au motif qu’il s’agissait « d’infiltrés » NR. Selon le journal Le Monde, ce serait près d’une centaine de militants qui auraient infiltré Ecolo-J, et ce, selon les déclarations même du secrétaire-général, Christian Bouchet, jusqu’à son instance dirigeante.
Après cet épisode, un groupe de NR français va créer « Résistance verte-Earth First ! », avec un bulletin, Eco-Action, qui présente l’idéologie du groupe : Néo-paganisme, écologie profonde ( les thèses d’Arn Naess) , et thèses NR pures et dures.
Il nous reste à nous, militants de 2023, d’étudier en profondeur ce sujet, tout en refusant le conspirationnisme de caniveau et les facilités consistant à voir des complots mondialistes partout.
Vincent Téma, le 15/08/23.