Pour un début de littérature NR

pierre drieu la rochelle et chat

Etudiant en lettres, je suis tous les jours déçu par le triomphe d‘une littérature où mes sentiments et mes aspirations ne trouvent pas leur place, et qui pourtant semble contenter à peu près tout le monde. A la recherche d’alternatives, j’ai d’abord pu m’intéresser à ce que certains nomment la « littérature de droite », c’est-dire-à des gens comme Beigbeder ou Houellebecq. C’est une littérature où l’on est plus sûr de déprimer ou de s’ennuyer que d’apprendre ou mieux, que de trouver un motif de combat. Rien qui puisse nourrir un puissant sentiment de révolte, laissant ainsi l’arme qu’est  la littérature à d’autres. La gauche cosmopolite ou philo wokiste ne manque pas, en effet, de faire sa place dans le domaine : les facultés de lettres sont peuplées de leurs représentants, tout comme les maisons d’édition. Mais pour tout esprit un tant soit peu rebelle, il est hors de question de laisser ce champ fertile être labouré, et semé, par des mains hostiles.  Non, Houellebecq n’est pas le seul pain dont on peut se rassasier.

Je m’adresse d’abord à ceux qui, égarés comme moi dans un univers culturel où ils ne se reconnaissent pas, recherchent une échappatoire émotionnellement productive et stimulante. Il faut lire, et la littérature au sens strict doit avoir sa place. Ce que je vous propose ici est une liste de dix lectures, dont j’essaie de faire ressortir l’intérêt, et qui permettrait à ceux qui n’ont pas eu le loisir de lire ces ouvrages que je vous propose, leur permettant de sortir un moment de l’atmosphère insupportable de médiocrité que l’on vous propose dans le monde officiel de la littérature. Les bouffées d’oxygène sont toujours profitables…

1-Gilles, de Drieu la Rochelle : Un livre un peu épais, mais d’une lecture facile et agréable. C’est l’histoire d’un jeune homme vétéran de la Grande Guerre, grand séducteur, et grand psychologue du genre humain, qui finit par être dégoûté par la vie qu’il mène, des succès faciles et des amis hypocrites, parce qu’il n’y trouve pas l’authenticité qu’il recherchait. Refusant de sombrer définitivement dans une angoisse morbide qui le détruirait de l’intérieur, il rejoint le camp nationaliste en Espagne lorsqu’éclate la guerre civile. C’est le roman d’un homme ayant tous les talents sociaux et intellectuels nécessaires pour réussir dans le grand monde, et qui finalement va se battre au service d’une cause qu’il estime juste et grande, au risque de tout perdre.

2-Les Déracinés, de Maurice Barrès : Ce roman retrace le parcours de sept jeunes bacheliers lorrains arrivant à Paris, et cherchant à s’y faire un nom. La tête pleine des enseignements de leur ancien professeur, un cosmopolite disciple de Kant, certains parviennent à un peu de gloire, d’autres connaissent un destin beaucoup plus tragique. Barrès s’intéresse au lien à comprendre entre patrie charnelle et  psychologie des hommes, s’interrogeant quant au devenir de l’être humain au cas où ce lien venait à être rompu, ou à l’inverse exploité.

3-La légende des siècles, de Victor Hugo : Dans la catégorie des envolées lyriques, mais aussi des réflexions profondes, de la douceur comme de la vigueur poétique, le nom d’Hugo s’impose. Hugo a voulu marquer la postérité par un recueil de poèmes illustrant l’amour, le deuil personnel, la lutte des idées, la célébration des justes et des chevaliers, la haine des tyrans et des médiocres. Il y en pour tous les goûts, à condition que ceux-ci aient en commun une fascination certaine pour le sublime.

4-Les mémoires d’Outre-Tombe, de Châteaubriand : Témoin de tous les évènements de l’histoire de France de la Révolution à la chute de la monarchie de Juillet, celui qui fut ambassadeur et ministre sous la Restauration raconte, à sa sauce, les massacres de la Révolution, l’ascension puis la chute de Napoléon, le retour des rois, et tous les vices de son temps. Mêlant politique, histoire et qualités littéraires, c’est là un ouvrage qui ravira les fans de ces trois genres.

5-Le père Goriot, de Balzac : Le plus grand contempteur des vices de la société bourgeoise raconte les débuts aventureux d’un jeune étudiant, Rastignac, et ses tentatives pour réussir socialement. Mais Rastignac l’ambitieux constate l’ingratitude et la détresse morale d’un monde où il veut réussir, symbolisé par la souffrance d’un homme que Rastignac assiste jusque dans ses derniers moments, le Père Goriot, un bon  père  qui se ruine pour ses filles, filles qui l’abandonnent à la pauvreté, à la maladie, puis à la mort.

6-Le Pavillon d’Or, de Yukio Mishima : C’est l’histoire d’un jeune Japonais qui, dans un pays qui se remet à peine de l’humiliation de la défaite de 1945, ne rêve que d’accomplir le vœu de son enfance : devenir le grand prêtre du Pavillon d’Or, un temple bouddhiste séculaire situé à Kyoto, l’ancienne capitale des empereurs. Mais affecté d’un handicap et déçu par l’existence qu’il mène jusqu’à présent, c’est finalement dans le feu et la vengeance qu’il accomplira, à sa manière, son rêve…

7-L’Iliade,d’Homère : Si vous aimez la bagarre, les dieux vengeurs et injustes et l’héroïsme, voilà de quoi satisfaire vos goûts. Après dix ans de combats et de siège autour de Troie, le chef des Grecs, Agamemnon, décide de garder pour lui une captive promise au plus redoutable des manieurs d’épée, Achille. Celui-ci décide en conséquence de laisser les Grecs affronter seuls des Troyens qui ne rêvent que de massacrer ces guerriers ayant franchi la mer pour récupérer la belle Hélène de Sparte…

8-Le Miel, de Slobodan Despot : Un livre de cet auteur serbe et helvétique contemporain, un des rares à nager à contre-courant de l’idéologie dominante. Dans ce court récit, Despot nous plonge dans la Serbie et la Croatie des années qui suivent la fin de l’éclatement de la Yougoslavie. Entre nostalgie de l’avant-guerre, souvenirs d’un conflit atroce et valeur de l’amitié, vous avez là le récit d’une véritable épopée vécue dans un pays où les braises des combats ne sont pas encore éteintes.

9-Journal d’un curé de campagne, de Bernanos : Un jeune curé, à peine sorti du séminaire, est chargé d’une petite paroisse de campagne, dans l’entre deux guerres. Témoin des péchés et des errances de ses paroissiens, vivant et survivant à une angoisse existentielle que seule la foi lui permet de repousser, le petit curé, fragile de santé et isolé, tente de sauver les âmes de tous ceux qu’il peut, et parfois malgré eux, et ce jusqu’à son dernier souffle. A conseiller à tous les croyants, et pas seulement les catholiques.

10- Le Chevalier des Touches, de Barbey d’Aurevilly : Dans les dernières années de la Restauration, de petits aristocrates normands, vieillissants, se réunissent et se rappellent le bon vieux temps de la chouannerie, et des nombreuses histoires où se mêlent aventure, fraternité et lutte pour le Roy. L’un d’eux se rappelle alors l’histoire du Chevalier des Touches, combattant et âme de la résistance « au visage d’ange », qui est capturé par les républicains, et que ses camarades, au terme d’une épopée rocambolesque, parviennent à faire libérer.

Que chacun s’y retrouve selon ses goûts, et parte lui-même explorer d’autres chefs d’œuvres !

Vincent Téma, le 23/05/2023.

Retour en haut