Depuis la mort il y a plus de soixante ans de l’un des plus grands représentants du nationalisme brésilien – Gustavo Barroso – il y a eu un grand vide dans notre culture, qui s’est aujourd’hui remplie de pornographie, de violence et de mensonges. L’Académie des Lettres brésilienne a perdu l’un de ses principaux intellectuels, dont la place a été occupée par des écrivains stupides comme Paulo Coelho [1] et Zelia Gattaï [2] … le Brésil a tellement perdu avec la mort de Barroso.
Si un intellectuel comme Barroso est aujourd’hui oublié, c’est à cause de son appui au Mouvement intégraliste brésilien et en tant qu’adversaire des « ennemis du Brésil ».
Gustavus Dodt Barroso était né dans la ville de Fortaleza, Etat de Ceara, Brésil, en 1888. Son père était un Brésilien qui était toujours en étroit contact avec l’élite intellectuelle et artistique de notre pays. Sa mère, d’origine allemande, n’imagina jamais qu’un jour le « petit Gustavus » deviendrait une icône nationale.
La carrière variée de Barroso le vit avocat, directeur de périodiques, dessinateur, illustrateur, romaniste, poète, maître de folklore brésilien, essayiste, traducteur, diplomate, juriste, professeur.
Il occupa des postes officiels dans de nombreux corps nationaux et étatiques, incluant ceux de Secrétaire de l’Intérieur et de la Justice pour Ceara (1914), Représentant pour Ceara (1915-1918), secrétaire de la délégation brésilienne à la Conférence de paix du Venezuela (1918-1919), superviseur des écoles du District (1919-1922), directeur du Musée Historique National (à partir de 1922), représentant de la Commission Internationale des Monuments Historiques à la Ligue des Nations.
Il occupa divers postes à l’Académie des Lettres brésilienne, y compris ceux de premier secrétaire et de secrétaire général (1923-1959) et fut président de l’Académie pendant deux mandats. Il fut aussi membre de diverses sociétés érudites outre-mer, incluant l’Académie portugaise d’Histoire et l’Académie des Sciences de Lisbonne.
Pionnier de l’étude de la culture régionale brésilienne, Barroso fut l’une des trois personnes désignées pour coordonner les études du folklore brésilien. Il publia en français Mythes, contes et légendes des Indiens du Brésil (1933). Son premier livre Terra do Sol (terre du soleil) fut consacré aux habitants de son État natal de Ceara.
Son quasi demi-siècle d’écriture résulta en approximativement 150 livres.
Intégralisme
En 1932, Plinio Salgado [1895-1975] (lui-même éminent écrivain) publia un manifeste à la nation brésilienne. Ensuite fut créée la Acao Integralista Brasileira (Action intégraliste brésilienne) pour s’opposer aux buts coloniaux du capitalisme international.
Salgado rencontra Barroso lors d’une conférence en 1933. Avec Miguel Reale, ces trois hommes devinrent les grands représentants du mouvement nationaliste brésilien, qui attira presque deux millions de partisans.
Pendant cette époque Barroso écrivit de nombreux livres exposant la doctrine de l’intégralisme, incluant [en portugais] L’Intégralisme en marche ; L’Esprit du 20ème siècle ; Quatrième Empire, Brésil : colonie des banquiers ; Judaïsme, maçonnerie et communisme ; La synagogue de Sao Paulo ; et Corporatisme, christianisme et communisme. A cause de ces livres, Barroso fut considéré comme « antisémite ».
Cependant, le mouvement étant fortement basé sur le christianisme, Salgado répondait à ces allégations que « personne ne peut parler contre la race de la mère de Jésus ».
Barroso écrivit dans son livre Judaïsme, maçonnerie et communisme (1937) :
« Parmi nous l’antisémitisme ne peut pas venir d’un sentiment raciste. Ce qui se passe en réalité dans le monde, miné par le terrorisme, est du racisme juif …Nous ne pouvons pas accepter que des étrangers totalement séparés de notre vie nationale, stratifiés dans des colonies israéliennes [sic], influencent les destinées de la nation, perturbent l’évolution politique, le rythme de l’économie et l’ordre public. Dominant la presse et la propagande, fanfaronnant quand ils ne peuvent pas donner des ordres, interférant dans la vie financière, dans le marché et dans l’industrie, ils ne s’assimilent pas et ne s’identifient pas aux intérêts nationaux, ne se préoccupant que d’eux-mêmes. »
Comprend-on pourquoi le nom de Gustavo Barroso a disparu des bibliothèques et de notre histoire ? Ses livres fournissent eux-mêmes la réponse.
Barroso mourut en décembre 1959. Mais loin des librairies et des écoles, son esprit vit dans chaque nationaliste, dans chaque Brésilien respectueux : Anaue ! [3]
A.A. Pires
Notes
[1] Auteur de best-sellers.
[2] Nouvelliste et épouse de Jorge Amado, écrivain et fervent communiste.
[3] Anaue : « tu es mon frère », expression indigène et salut intégraliste.
Article publié dans la revue néo-zélandaise « Western Destiny », numéro 35, mai 2004.
Le mouvement « intégraliste » était beaucoup plus radical que le « gétulisme » de Getulio Vargas (1883-1954). Vargas arriva au pouvoir après un coup d’État en octobre 1930 et devint « président provisoire ». A partir de 1934, il fit un virage à droite, fit alliance avec les intégralistes et proclama une constitution « corporatiste ». En novembre 1937, il proclama l’« Estado Novo » et établit un régime dictatorial s’inspirant largement du fascisme mussolinien et du régime de Salazar. Cependant, en 1938, les « intégralistes » tentèrent contre Vargas un coup de force qui échoua ; le mouvement intégraliste se désagrégea à la suite de cet échec. Bien qu’ayant des sympathies pour l’Axe, Vargas finit par choisir le camp des Alliés (principalement pour des raisons économiques) et déclara la guerre à l’Allemagne et à l’Italie en août 1942. La marine et l’aviation brésiliennes prêtèrent main-forte aux Alliés dans la chasse aux U-Boot et une force brésilienne participa à la campagne d’Italie. L’armée chassa Vargas en 1945, mais il revint légalement au pouvoir en 1950. Confronté à des difficultés, il effectua un virage « socialiste » (nationalisation du pétrole brésilien, etc.). Se trouvant dans une impasse, isolé internationalement, soupçonné d’être impliqué dans le meurtre d’opposants, et mis en demeure de démissionner par l’armée, il se suicida en août 1954. [NDT]