Contradictions légales au sujet des fins de vie

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Le 29 octobre dernier, Emmanuel Macron annonçait sur X (ex-Twitter) son intention d’inscrire dans la Constitution de la Ve République l’avortement. Une phrase serait ajoutée à l’article 34 : « La loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté de la femme, qui lui est garantie, d’avoir recours à l’IVG. » La révision serait adoptée en Congrès réuni à Versailles par le vote qualifié des trois cinquièmes des députés et des sénateurs.

Cette procédure parlementaire éviterait le risque de référendum que ne veut pas ce très grand démocrate. Le Monde du 31 octobre 2023 rapporte les propos d’un conseiller de l’Élysée pour qui une campagne référendaire accorderait « une tribune totalement disproportionnée par rapport à ce qu’ils [les groupes hostiles à l’IVG] représentent en réalité ». Le choix du Congrès offrirait au contraire au système médiatique d’occupation mentale une mise sous pression maximale sur tout parlementaire réfractaire ou abstentionniste.

Une fois encore, Macron se trompe. Il devrait observer ce qui se passe actuellement aux États-Unis. Dans les États dits conservateurs qui soumettent à leurs électeurs la question de l’avortement, ceux-ci répondent favorablement à son maintien et désavouent des républicains inféodés aux sectes évangéliques. Redoutable animal politique, Donald Trump a déjà compris cette désaffection. Il ne considère plus ce sujet sociétal comme une priorité dans sa campagne électorale de l’année prochaine. En Pologne, les nationaux-conservateurs atlantistes du PiS viennent de perdre les élections législatives. Leur politique anti-IVG bien trop restrictive a favorisé la mobilisation de leurs opposants, à savoir les plus jeunes électeurs et les électrices. Jaroslaw Kaczyński n’est pas Viktor Orban, plus fin et plus subtil.

Ce projet de révision constitutionnelle court-circuite cependant un autre projet gouvernemental traitant de la fin de vie, du suicide assisté et de l’euthanasie. Le contraste en devient saisissant. La Constitution, une nouvelle fois défigurée, comportera à la fois l’interdiction d’éliminer physiquement des ordures (tueurs d’enfants, assassins de personnes âgées, terroristes, trafiquants, vendeurs et usagers de drogues, etc.) et l’approbation de la fin du fœtus. Quant à la loi sur l’euthanasie, elle autoriserait les médecins à abréger sous certaines conditions pour l’heure floues la vie de patients jugés incurables ou trop âgés. Les Pays-Bas et la Belgique montrent dès à présent d’inquiétantes dérives dans ce domaine.

Et puis, quel avenir pour l’objection de conscience des personnels de santé en matière d’avortement ? Son introduction dans la Constitution interdira-t-elle toute contestation ? Y aura-t-il sous peu un délit de contestation de l’IVG ? Remarquons qu’on peut toujours réclamer le rétablissement de la peine capitale sans déclencher de poursuites judiciaires. En juin 2023, des militants anti-IVG à Lyon ont osé l’impensable. Ils ont collé des autocollants contre l’avortement sur les vélos en libre service de la métropole dirigée par les Verts. L’exécutif métropolitain a porté plainte pour dégradations. Mais les enquêteurs ont usé du délit d’entrave à l’IVG. Serait-ce un détournement de la loi ? Serait-il possible d’étendre ce délit à d’autres actions hors de tout lieu de santé ? Laissons à Foxley le soin de répondre à cette double interrogation dans une prochaine intervention de sa remarquable chronique, « De Droit et de Croc ».

Remarquons en outre que ceux qui souhaitent l’abolition de cette objection de conscience étaient les mêmes à militer au temps du service national obligatoire en faveur de l’objection de conscience… Cette dernière serait-elle donc sécable ou malléable au gré des circonstances ?

Qu’on ne se méprenne pas ! Votre serviteur qui n’est pas monothéiste ne considère pas la vie comme un absolu indépassable. La peine de mort est une nécessité fondamentale pour le bon ordre social. C’est la voûte qui soutient tout l’édifice pénal. Son abolition lamentable excite le crime et encourage l’amoindrissement progressive des peines dites incompressibles. Par exemple, la justice belge refuse de renvoyer en France Salah Abdeslam, le seul terroriste survivant des attentats du 13 novembre 2015, condamné à la réclusion à perpétuité sans aucune réduction de peine. Les magistrats belges assimilent cette peine à une peine ou à un traitement inhumain ou dégradant ! On sait que les progressistes militent pour la suppression de la peine de sûreté de 22 ans qui violerait les droits de l’homme, de la femme et des poux. Ces officines grotesques s’élèvent contre la prison, sauf quand il s’agit d’enfermer historiens critiques et militants dissidents.

Les plus hypocrites dans ces débats de société restent bien sûr les Verts. Ces soi-disant écologistes s’affichent en défenseurs véhéments du vivant : ils défendent les cours d’eau, les écosystèmes, les paysages, la faune et la flore. Ils sont prêts à interdire la corrida dans le Midi, les combats de coqs dans le Nord et la chasse partout. Ils manifestent devant les boucheries traditionnelles artisanales qui heurtent leur véganisme. Ces ardents chantres du vivant sont prêts à deux coups de fourchettes de manger de la viande végétale industrielle… À quand donc des lions herbivores ? Ils sont enfin pro-choix. Ils s’opposent aux OGM avec raison, mais ils acceptent les OHCM (organismes humains chimiquement modifiés) dans le cadre d’une transition sexuelle. Frappés d’hémiplégie conceptuelle, ces défenseurs de la bio-diversité se moquent de l’indispensable ethno-diversité et développent des réflexes manichéens pavloviens, assis dans leur salon embourgeoisé en attendant l’arrivée d’un Uber ou d’un Delivroo.

Contrairement aux chrétiens, la fin de vie peut être anticipée à la suite de Pierre Drieu la Rochelle, de Henry de Montherlant, de Yukio Mishima et de Dominique Venner. Ces quatre morts volontaires confortent une philosophie vitale de l’homme intégral. Se donner la mort n’est pas un interdit moral comme ne l’est pas la limitation par des avortements nécessaires des risques de transmission de maladies génétiques inguérissables ou de tares héréditaires.  On peut très bien imaginer qu’une société ré-organisée, verticale et hiérarchisée instaure l’autorisation préalable de mariage et le permis de conception.

Ainsi est-on très loin des motivations politiciennes et féministes de pacotille en faveur de l’introduction de l’IVG dans la Constitution. Le sujet est en tout cas bien trop sérieux pour le confier aux branquignols politiciens.

Salutations flibustières !

Georges Feltin-Tracol

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