Hommage à Louis Rossel

louis rossel

Prononcé par Stéphane Parédé, sur la tombe de Louis Rossel à Nimes, le 11 novembre 1999.

18 mars 1871 : les généraux Thomas et Lecomte qui avaient tenté de reprendre à la Garde Nationale les canons de la butte Montmartre sont exécutés en pleine rue. Durant neuf semaines, la Commune de Paris va rendre à la France sa dignité qu’elle avait perdue dans une humiliante défaite.

Six mois auparavant, Napoléon III capitule dans le déshonneur à Sedan; le Maréchal Bazaine enfermé dans Metz avec 200.000 hommes de bonne troupe signe sa reddition.

Le parti de la réaction entend imposer une paix honteuse à la France.

Les Prussiens, goguenards, sont aux portes de Paris, mais le peuple veut continuer à se battre.

Le 19 mars, un jeune capitaine de 27 an, issu de l’armée de Bazaine, évadé de Metz, envoie une lettre insolente au Ministre de la Guerre :

« Monsieur le Général-Ministre de la Guerre, j’ai l’honneur de vous informer que je me rends à Paris pour me mettre à la disposition des forces gouvernementales qui peuvent y être constituées. Instruit par une dépêche de Versailles rendue publique aujourd’hui qu’il y a deux partis en lutte dans le pays, je me range sans hésitation du côté de celui qui n’a pas signé la paix et qui ne compte pas dans ses  rangs de généraux coupables de capitulations ».

Louis Rossel ne sait pas qu’en même temps qu’il a signé son arrêt de mort, il a posé la première pierre du nationalisme révolutionnaire français.

Celui qui avait préconisé en janvier 1871 d’organiser un réduit militaire dans le Massif Central et de lancer des actions de guérillas se met au service du Paris insurgé.

Le 23 mars, il est nommé chef de la 17° légion de la Garde Nationale, et le 30 avril, il donnera à la Commune sa seule victoire militaire en reprenant de haute lutte aux Versaillais le fort d’Issy. Chef d’Etat-Major, il est nommé, le 1 mai, Ministre de la Guerre, mais devant les querelles byzantines et l’incurie des militaires, il démissionnera le 10 mai, selon sa propre expression, d’un « gouvernement révolutionnaire sans révolutionnaires ».

Arrêté sur dénonciation, condamné à la peine de mort, exécuté le 28 novembre 1871, il aura été au sein de la Commune, avec Vallès et les blanquistes, le partisan d’une république nationale et sociale, aussi éloignée des conceptions étatiques d’un Karl Marx que des palinodies réactionnaires d’un futur général Boulanger, tous deux communiant dans leur haine du soulèvement populaire.

Epris de culture classique, conscient de l’apport de la Grèce dans notre civilisation, défenseur de la langue d’Oc, partisans d’une large autonomie des provinces, précurseur avant l’heure de l’entente franco-allemande, nul doute que Rossel, né un siècle plus tard eût été des nôtres.

Seul officier exécuté sous  la Troisième République, honni par les Versaillais comme par les Communards, patriote intransigeant, son comportement aristocratique et son éthique rigoriste en ont fait la victime expiatoire idéale tant pour les bourgeois que pour cette racaille qu’il ne faut pas confondre avec le peuple.

Ernst Jünger a écrit : « Je vois se lever en Europe une génération nouvelle de chefs de file qui ne connaîtront ni peur, ni répugnance à verser le sang, dénués d’égards, habitués à souffrir terriblement, mais aussi à agir terriblement ». Assurément camarade Rossel, tu figureras parmi les meilleurs !

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